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3 Etude de HD 125273 (= BD $+53^{\rm \circ}1704$)

La nature Am de HD 125273, étoile de magnitude 7,8 dans la constellation du Bouvier, a d'abord été suspectée par Olsen (1980) sur la base d'observations photométriques dans le système de Strömgren, puis confirmée et précisée par les observations spectrographiques de Abt (1984) qui donne la classification détaillée de cette étoile suivant la raie K de Ca II, les raies de l'hydrogène et les raies métalliques, soit : A6/F1/F3.

3.1 Vitesses radiales

Aucune vitesse radiale de HD 125273 n'était, à notre connaissance, publiée. Dès nos premières observations, en février 1992, nous avons constaté que les traces de corrélation des deux composantes de cette BS etaient nettement visibles ; de plus, la différence de leurs profondeurs permettait de les relier sans ambiguïté aux composantes primaire ou secondaire. Nos observations, 47 VR pour la primaire et 41 VR pour le compagnon, poursuivies jusqu'en janvier 1997 (240 cycles orbitaux), ont permis la détermination des éléments orbitaux définitifs de cette BS à raies doubles de 7,5 jours de période. Le traitement des observations (obtention des VR définitives rattachées au système international ; déconvolution des traces de corrélation) a été effectué à l'Observatoire de Genève. La précision des VR (erreur standard interne moyenne) est de 0,7 km/s pour celles de la composante primaire, et de 0,8 km/s pour celles de la secondaire.

3.2 Calcul des éléments orbitaux

Le calcul des éléments orbitaux de cette BS a été effectué au Laboratoire d'Astrophysique de l'Observatoire midi-Pyrénées, sur ordinateur Dec Alpha, avec nos programmes FORTRAN BS1 et BS2 (Nadal et al. 1979). Dans un premier temps, au moyen du programme BS1, nous avons calculé séparément ces éléments pour les composantes primaire et secondaire afin de nous assurer qu'ils étaient en concordance et qu'il n'y avait donc pas de perturbations physiques dans le système. Ensuite, les éléments définitifs ont été déterminés à l'aide du programme BS2 qui traite globalement les VR des composantes d'une BS à deux spectres. Pour effectuer ce calcul, compte tenu de leurs erreurs standards moyennes, les VR ont été pondérées avec les valeurs 1 pour la primaire et 3/4 pour la secondaire ; une VR du compagnon a cependant été pondérée à la valeur 1/2 car son erreur standard interne dépassait 1 km/s. Les éléments orbitaux de HD 125273 ainsi obtenus sont les suivants :

\begin{displaymath}
P = 7,482664 \pm 0,000047\;{\rm jours} \end{displaymath}

\begin{displaymath}
T = {\rm JJ}\, 2448665,660 \pm 0,042 \end{displaymath}

\begin{displaymath}
\omega_1 = 355,3^{\rm \circ} \pm 2,0^{\rm \circ} \end{displaymath}

\begin{displaymath}
e = 0,071 \pm 0,003 \end{displaymath}

\begin{displaymath}
K_1 = 49,82 \pm 0,15 \; {\rm km/s} 
 \end{displaymath}

\begin{displaymath}
K_2 = 51,75 \pm 0,18\;{\rm km/s} \end{displaymath}

\begin{displaymath}
V_0 = -17,42 \pm 0,09\;{\rm km/s} \end{displaymath}

\begin{displaymath}
a_1 \,{\rm sin}i = 5,113 \pm 0,015~{\rm Gm} \end{displaymath}

\begin{displaymath}
a_2 \,{\rm sin}i = 5,311 \pm 0,019\;{\rm Gm} \end{displaymath}

\begin{displaymath}
M_1\,{\rm sin}^3i = 0,412 \pm 0,003\,M_\odot \end{displaymath}

\begin{displaymath}
M_2\,{\rm sin}^3i = 0,396 \pm 0,003 \,M_\odot \end{displaymath}

\begin{displaymath}
\sigma ({\rm O}{-}{\rm C}) = 0,7 \;{\rm km/s}. \end{displaymath}

Les vitesses radiales observées et les écarts O-C figurent en Table 1 ; les courbes de VR des deux composantes, calculées à partir des éléments orbitaux ci-dessus, sont données à la Fig. 1.
  
\begin{figure}
\centerline{

\includegraphics [width=8cm]{6302f1.eps}
}\end{figure} Figure 1: Courbes de vitesse radiale des composantes primaire (trait plein) et secondaire (trait interrompu) de la binaire spectroscopique HD 125273. La phase zéro correspond à l'époque du passage au périastre


  
Table 1: Vitesses radiales de HD 125273. VR1, (O-C)1 : vitesses radiales et résidus pour la composante primaire ; VR2, (O-C)2 : mêmes quantités pour la secondaire
,D,,-1
\begin{tabular}
{r,cccccc}\hline
 N$^{\rm \circ}$\space & \multicolumn{1}{c}{\hs...
 ...\, 1997& 50477,652& 0,159& +12,3& 
+1,0 &$-46,4$ &+0,8 \\  \hline
 \end{tabular}


3.3 Discussion

- Paramètres physiques fondamentaux du système

Olsen (1983) a publié les indices photométriques dans le système de Strömgren de HD 125273 : $b-y = 0,163~;\, m_1 = 0,245~; \,c_1 = 0,849~;\, V = 7,843$. Comme $\beta $ n'était pas donné, nous l'avons déterminé à l'aide de la relation $\beta / b{-}y$ donnée par Crawford (1979), soit : $\beta = 2,783$.

Toujours à l'aide des calibrations de Crawford (1979) pour les étoiles A de la séquence d'âge zéro, on trouve : $\delta m_1 = -0,049~;\,\sigma c_1 = 0,103$ et, au moyen de la toute récente calibration proposée par North et al. (1997), Mv = 1,24 mag. En utilisant la grille de Moon & Dworetsky (1985) relative aux étoiles avec $T_{\rm eff} < 8500$ K (ce qui est certainement le cas ici vu la classification de Abt et l'indice de couleur B-V = 0,29), on déduit $T_{\rm eff} = 7500$ K, log g = 3,87, cette dernière valeur étant ramenée à log g = 3,70 après correction de l'effet de métallicité (Dworetsky & Moon 1986) ; et par suite $M_{\rm bol} = 1,16$ ; log $L/L_\odot = 1,436~;\, R = 3,22\, R_\odot$.

Bien entendu ces valeurs sont des moyennes pour les deux composantes (comme les indices de Strömgren dont elles proviennent), mais cela ne présente pas un gros inconvénient étant donné que ces composantes, de masses voisines, sont certainement très semblables.

A la Fig. 2, nous montrons la position du système dans le diagramme HR, par rapport aux trajets évolutifs pour diverses masses stellaires (Schaller et al. 1992). Nous constatons que HD 125273, avec un âge de 0,85 milliard d'années (log t = 8,93) apparaît quelque peu évoluée sur la séquence principale, et que la masse moyenne des composantes peut être estimée à 2,1 $M_\odot$.

  
\begin{figure}
\centerline{

\includegraphics [width=8cm]{6302f2.eps}
}\end{figure} Figure 2: Position de HD 125273 dans le diagramme HR (cercle clair). Les lignes continues sont les tracés évolutifs pour des masses comprises entre 1,5 et $2,5~M_\odot$ ; les lignes en trait interrompu représentent les isochrones, avec un pas de 0,1 en log t (t en années)
Cet état d'évolution implique log g = 3,75, ce qui est en excellent accord avec la valeur donnée par la photométrie. Avec M = 2,1 $M_\odot$, on a $i\sim 35^{\rm \circ}$, et par suite a = a1 + a2 = 18,17 Gm $\sim 26~R_\odot$.

Dans ces conditions, HD 125273 serait un système détaché ne présentant pas d'éclipses. Quant à sa distance, elle peut être estimée : 1) à partir de Mv obtenue par la photométrie de Strömgren, et 2) à partir de la parallaxe $(\pi = 3,17 \pm 0,71$ mas) fournie par Hipparcos. En supposant ici que les composantes sont identiques, et par conséquent plus faibles de 0,75 mag. que la magnitude apparente V du système, on trouve, avec Mv = 1,24, une distance de 295 pc en très bon accord avec celle déduite de la parallaxe Hipparcos, d = 315 (+92, -57) pc. Notons que dans notre étude nous avons négligé le rougissement interstellaire ; en effet, d'après les cartes de Lucke (1978), l'excès de couleur E(B-V) ne devrait pas dépasser 0,04 mag.

- Synchronisme rotation-révolution

L'analyse du profil de la trace de corrélation permet d'accéder à la valeur de la projection de la vitesse équatoriale de chaque composante, $\nu \,{\rm sin}i$. Cette détermination, effectuée à l'observatoire de Genève, conduit ici à des valeurs très proches pour les deux composantes : 11,0 km/s pour la primaire et 10,7 km/s pour la secondaire, la précision sur ces quantités étant, pratiquement, de 1 km/s. Cette similitude, et la valeur courte de la période, permettent d'envisager le synchronisme entre rotation axiale et révolution orbitale au sein du système.

Dans cette hypothèse (et celle de coplanarité entre plans équatoriaux des étoiles et plan orbital), nous pouvons estimer le rayon des composantes par la relation : $R/R_\odot = 
0,01977$.P.$V_{\rm e}$, où $V_{\rm e}$ est la vitesse équatoriale ; on obtient avec nos données $R \sim 2,85 \pm 0,25 \,R_\odot$ comme rayon moyen des composantes. Cette valeur étant compatible, tant avec celle trouvée plus haut qu'avec celles déduites directement de l'étude de systèmes similaires, mais présentant des éclipses (Kitamura & Kondo 1978), nous pouvons donc retenir l'hypothèse du synchronisme.

- Différence de magnitude et relation masse-luminosité

Pour HD 125273, les éléments dont nous disposons : rapport de masses proche de l'unité et traces de corrélation de profils similaires, indiquent que l'étoile primaire et son compagnon sont de nature très voisine (vraisemblablement deux étoiles Am), ce qui nous permet de supposer T2 = T1 ; la différence de magnitude des composantes peut alors être obtenue à partir des surfaces des traces de corrélation, W1 et W2, dont le rapport est proportionnel à celui des luminosités des deux étoiles (Lucke & Mayor 1980). Comme les observations donnent W1 / W2 = 1,25, on en déduit $\Delta m_b = \Delta m_v = 0,24$ mag.

Dans une étoile binaire spectroscopique, il n'est en général pas possible de vérifier si les composantes, prises individuellement, satisfont ou non à la relation masse-luminosité. Cependant, s'il s'agit d'une BS à deux spectres dont la différence de magnitude des composantes peut être estimée à partir des observations, on peut voir comment, globalement, le système se comporte vis-à-vis de cette relation. Pour effectuer ce test, nous avons utilisé la relation préconisée par Schmidt-Kaler (1982) pour les étoiles de la séquence principale : log $M/M_\odot = 0,46 {-} 0,10\, M_{\rm bol}$, ce qui, dans le cas d'une binaire, s'écrit : log $(M_1 / M_2) = 0,10 \, \Delta M_{\rm bol} 
= 0,25$ log (L1 / L2). Cette relation, appliquée à HD 125273, conduit à L1 / L2 = 1,17 à partir du rapport de masses déduit des observations.

Le rapport des luminosités des composantes peut, d'autre part, être directement estimé à partir de la différence de magnitude $\Delta m_v$. En effet, compte tenu de l'hypothèse T1=T2, les corrections bolométriques sont les mêmes pour chaque composante du système et on a pratiquement : $\Delta m_v = \Delta M_{\rm bol} 
= 2,5$ log (L1 / L2), ce qui donne L1 / L2 = 1,25. Cette dernière valeur étant proche, à moins de 10 % près, de celle trouvée précédemment, nous en concluons que le système obéit à la relation masse-luminosité, comme on pouvait s'y attendre vu le modèle proposé (système détaché, étoiles naines).

Acknowledgements

Nous tenons à remercier le referee, P. North, pour ses intéressantes suggestions et pour nous avoir fait bénéficier de ses connaissances dans l'utilisation et l'interprétation des indices de Strömgren. Nos remerciements aussi à M. Mayor pour l'attribution des missions à CORAVEL, ainsi qu'à S. Udry pour le traitement de nos observations à l'observatoire de Genève. Les recherches bibliographiques ont été effectuées à l'aide de la base de donnée SIMBAD du CDS de Strasbourg (France).



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